Lambeau du grand dorsal

Intervention efficace pour une rupture irréparable de la coiffe des rotateurs

 

Le transfert du grand dorsal appelé aussi lambeau du grand dorsal est une intervention qui s’adresse aux patients présentant une rupture irréparable de la coiffe des rotateurs de première intervention ou après une tentative de réparation.

 

C’est une alternative efficace à la prothèse d’épaule inversée en particulier pour les patients actifs et jeunes. Le transfert du grand dorsal a montré son efficacité pour soulager le patient de ses douleurs tout en permettant de retrouver une épaule mobile.

 

Cette intervention qui nécessite un chirurgien expérimenté de l’épaule, verra son résultat conditionné également par une rééducation rigoureuse de plusieurs mois.

Transfert ou lambeaux du grand dorsal : le contexte

Qu’est-ce qu’une rupture massive et irréparable de la coiffe des rotateurs ?

La rupture massive et irréparable de la coiffe des rotateurs est très souvent à l’origine de douleurs de l’épaule s’accompagnant progressivement d’une perte de mobilité. Cette rupture massive et irréparable est définie comme une rupture au moins de 2 tendons à l’épaule, et/ou d’une taille supérieure à 3 cm, et/ou d’une dégénérescence avancée des muscles de la coiffe en graisse.

Cette rupture massive et irréparable va être responsable d’une ascension de la tête humérale (os du bras), responsable alors d’une détente du muscle deltoïde principal elle-même responsable de la perte de mobilité et de force.

Rupture massive de la coiffe des rotateurs

Rupture massive et irréparable de la coiffe des rotateurs

Vue en vidéo, la tête humérale apparaît chauve.

Rôle de la coiffe des rotateurs

Rôle de la coiffe des rotateurs

La coiffe des rotateurs a pour rôle de maintenir la tête de l’humérus centrée dans l’articulation et donc d’éviter son ascension par l’action du muscle deltoide.

Quels traitements pour une rupture massive et irréparable de la coiffe des rotateurs  ?

    Plusieurs traitements sont possibles dans l’arsenal à la disposition du chirurgien pour traiter les conséquences d’une rupture massive et irréparable de la coiffe des rotateurs :

    • La ténotomie-ténodèse est relativement simple et peu agressive, cette intervention se déroule sous vidéo (arthroscopie). Seule, son effet est souvent limité et s’adresse aux patients peu actifs. Elle est beaucoup plus intéressante combinée aux réparations partielles ou aux transferts de grand dorsal.
    • La réparation capsulaire a pour principe en quelque sorte de couvrir le trou dans la coiffe des rotateurs laissé par la rupture massive. Elle va utiliser des membranes ou patch le plus souvent en matrice porcine décellularisée. Les résultats se sont avérés relativement décevants.
    • La réparation partielle comme son nom l’indique consiste à réparer ce qui est possible dans une rupture massive et pas totalement réparable. Pratiquée sous vidéo (arthroscopie), elle est relativement peu invasive mais donne en moyenne des résultats moins bons que ceux après transfert du grand dorsal.
    • La prothèse inversée est un traitement efficace dans cette indication. De plus les prothèses ont fait d’énormes progrès dans la dernière décennie voyant leur longévité très nettement s’accroître. Cependant c’est un traitement définitif, qui s’adresse plutôt aux patients âgés de plus de 60 ans.
    • Le lambeau du grand dorsal a de nombreux avantages. Il permet de reculer l’implantation d’une prothèse d’épaule notamment quand les patients sont jeunes et actifs. Il ne coupe aucun pont et permet de soulager efficacement les douleurs et de re donner une épaule mobile. Cependant sa technique est exigeante et la rééducation post-opératoire longue.
      principe de la réparation capsulaire ou une membrane (en générale d’origine porcine) vient combler le trou au-dessus de la tête de l’humérus laissé par la rupture massive et irréparable

      Réparation capsulaire

      Une membrane (en générale d’origine porcine) vient combler le trou au-dessus de la tête de l’humérus laissé par la rupture massive et irréparable.

      Radio d'une prothèse d'épaule

      Prothèse d'épaule inversée

      Rupture massive et irréparable de la coiffe des rotateurs responsable d’une ascension majeure de la tête, traitement par mise en place d’une prothèse d’épaule inversée.

      Focus sur le Transfert ou lambeau du grand dorsal

      Qu’est ce que le transfert ou lambeau du grand dorsal pour traiter une rupture massive et irréparable ?

      L’opération du transfert (ou lambeau) de grand dorsal consiste à prélever un muscle (le muscle grand dorsal) et son tendon qui sont normalement fixés sur votre bras, pour venir le faire glisser au-dessus de votre épaule, là où il existe une rupture des tendons de la coiffe des rotateurs devenue irréparable.

      Lambeau grand dorsal

      Changement d’une prothèse d’épaule pour usure (reconstruction de l’os par utilisation d’une greffe)

      Le lambeau a deux objectifs qui ont largement été étudiés et vérifiés notamment au travers de travaux scientifiques. Il va efficacement soulager le patient de ses douleurs et lui redonner une épaule bien mobile. Cependant le gain de force est le plus souvent beaucoup plus limité. On parle de transfert car on va transférer un muscle depuis le bras vers l’épaule, pour lui donner une nouvelle fonction : celle de soulever le bras. Il faut bien préciser que ce transfert ne crée aucune séquelle. Le transfert de grand dorsal a par ailleurs d’autres indications reconnues comme la reconstruction mammaire après cancer.

      Le transfert à l’épaule est classiquement proposé soit à des patients présentant une épaule dite pseudo-paralytique, c’est à dire ne bougeant presque plus seule en raison de l’importance de la rupture soit en raison de la douleur induite aussi par la rupture massive.

      coupes de scanner montrant l’évolution en plusieurs stades, de la transformation en graisse des muscles de l’épaule après rupture massive et irréparable de la coiffe des rotateurs, au fil du temps. Le stade 4 correspond au stade le plus sévère ou la totalité du muscle s’est transformée en graisse du fait de la rupture

       

      Évolution des muscles de l’épaule après rupture massive et irréparable de la coiffe des rotateurs (Scanner).
      Le stade 4 (St 4) correspond au stade le plus sévère ou la totalité du muscle s’est transformée en graisse du fait de la rupture

      Quelles sont les conditions pour réaliser l’opération de lambeau du grand dorsal ?

      Quelques conditions sont obligatoires à la réalisation du transfert et devront être vérifiées par le chirurgien avant l’intervention. On citera :

      • La persistance d’une épaule mobile au moins en passif (c’est-à-dire que l’épaule bouge si le chirurgien la lève lui-même)
      • Le tendon sous-scapulaire doit être fonctionnel ou au moins totalement réparable
      • Pas d’arthrose importante dans l’épaule
      • Un patient volontaire avec une épaule douloureuse chronique à l’origine d’une gêne sévère dans la vie quotidienne.

       En revanche un déficit isolé de rotation externe active ne constitue pas une contre indication si l’épaule peut au moins être levée par le chirurgien.

      L'intervention de transfert ou lambeau du grand dorsal

      Grands principes de l’intervention

      L’objectif est de transférer un muscle et son tendon (le grand dorsal) depuis le bras vers l’épaule sus-jacente, pour lui donner une nouvelle fonction : celle de soulever le bras. Le muscle grand dorsal et son tendon ainsi transférés vont pallier la rupture irréparable de la coiffe des rotateurs en jouant son rôle. L’absence de rotation externe active sera prise en compte pour le lieu de fixation du tendon grand dorsal afin de la récupérer (en partie aussi avec l’élévation du bras).

       

      Déroulement de l’intervention

      Tout d’abord le patient va être installé en position demi-assise (= beach chair). L’anesthésie sera générale et le temps opératoire est d’environ 1h30. Le premier temps consiste à faire une incision d’environ 5 cm dans le creux axillaire. Elle va permettre de libérer le muscle grand dorsal et son tendon des autres muscles en préservant les nerfs et vaisseaux.

      Prélèvements du muscle et tendon grand dorsal par une courte incision au niveau du creux axillaire. Prélèvements du muscle et tendon grand dorsal par une courte incision au niveau du creux axillaire.

      Une fois totalement libéré le tendon du grand dorsal sera renforcé à l’aide de fils pour le tracter et le faire cheminer sous le deltoïde en direction de la coiffe des rotateurs et de la tête de l’humérus à l’aide d’une pince. La récupération se fera au niveau de l’épaule la plupart du temps sous vidéo (arthroscopie) pour éviter une seconde incision et préserver le muscle deltoïde.

      Une fois le tendon récupéré au niveau de la coiffe de l’épaule, celui-ci sera appliqué dans toute sa surface afin d’essayer de remplir la perte de substance tendineuse induite par la rupture. Le tendon sera alors fixé à la tête de l’humérus par des ancres dédiées et des points de suture à la coiffe restante.

       


      Intervention du lambeau du grand dorsal
      Le tendon et le muscle préparés vont ensuite cheminer vers la tête de l’humérus où ils seront au sommet définitivement fixés.

      En fonction de l’examen clinique du patient avant l’intervention, le positionnement de la fixation peut varier :

      • Si on veut favoriser l’élévation antérieure sans douleur, la fixation sera au-dessus de la tête de l’humérus.
      • En revanche si on veut favoriser la rotation externe déficiente (impossibilité de porter la main vers l’extérieur alors la fixation se fera plus en arrière de la tête, au niveau de l’insertion de l’infra-épineux qui est un rotateur externe.
      • Quand cela est possible, l’efficacité du transfert sera augmentée par la réalisation complémentaire de la ténotomie-ténodèse.

      Le cas échéant et en fonction des découvertes per opératoires ou d’une difficulté rencontrée, votre chirurgien pourra procéder à une autre technique jugée par lui plus profitable à votre cas spécifique.

       

      Quelles suites opératoires après l’intervention de lambeau du grand dorsal ?

      Classiquement, cette opération nécessite 2 nuits d’hospitalisation. Les pansements seront à refaire tous les 48 à 72 h et les fils pourront être enlevés au 15ème jour. La douleur est bien contrôlée par la prise de médicaments antalgiques et cèdera en quelques jours. Des poches de glace appliquées sur l’épaule aideront au soulagement de la douleur.

      Votre membre et l’épaule seront immobilisés dans une attelle pour une durée de 4 semaines en rotation neutre (= bras dans l’axe). Cette immobilisation si elle peut-être perçue comme contraignante, permettra de faciliter la rééducation. La rééducation va être débutée en pendulaires les 4 premières semaines, c’est-à-dire en effectuant des petits gestes concentriques de l’épaule. Après 4 semaines, l’attelle est définitivement enlevée et la rééducation s’intensifie tout en s’adaptant à l’évolution pour récupérer au fil des mois, une épaule totalement mobile.

      Pendant la période post-opératoire votre autonomie va être diminuée. La mobilité de votre épaule va être limitée, le temps que les structures réparées cicatrisent et se fixent solidement. Ce délai varie entre 6 semaines et 3 mois.

      Ces délais sont variables et sont donnés à titre indicatif et seront confirmés lors de la consultation avec votre chirurgien.

       

      Quelle reprise des activités ?

      Le chirurgien passera dans votre chambre avant la sortie pour vous expliquer les mouvements que vous pouvez faire, les exercices et comment utiliser l’attelle que vous conserverez 4 semaines. L’attelle pourra être enlevée quelques heures par jour mais devra être conservée la nuit.

      La rééducation en centre ou en cabinet de ville devra débuter dans les jours qui suivent l’opération. Très douce au début (techniques passives et pendulaires) elle aura pour objectif d’assouplir l’épaule et d’éviter un enraidissement long à récupérer. À partir de la 4ème semaine et donc du premier RDV de contrôle avec votre chirurgien, l’attelle sera définitivement enlevée. La rééducation pourra alors s’intensifier pour une meilleure récupération. La durée de rééducation moyenne est de 3 à 6 mois.

      La reprise de la conduite pourra être reprise à la fin du 2ème mois suivant l’intervention. La reprise progressive du sport pourra s’envisager à la fin du 4ème mois de façon progressive.

       

      Quelles sont les complications possibles après un transfert de grand dorsal ?

      Si des complications sont toujours possibles comme toute intervention chirurgicale, les risques seront diminués par l’expérience du chirurgien. Néanmoins, certaines complications reste possibles après l’intervention de lambeau du grand dorsal :

      • L’infection du site opératoire est toujours possible, la prise d’antibiotiques et la toilette chirurgicale permettront de diminuer son risque de survenue.
      • Un hématome en particulier sous l’épaule peut survenir après le prélèvement du lambeau et-entrainer un gonflement temporaire qui se résorbera aidée par l’application de glace. Un drainage mis en place 24h aidera à diminuer ce risque.
      • Un enraidissement sévère de l’épaule appelée capsulite ou algodystrophie de l’épaule peut survenir. Des phénomènes douloureux et inflammatoires encore mal connus pourraient en être à l’origine, entrainant une prise en charge spécifique avec rééducation adaptée, bilans complémentaires et parfois prise en charge spécifique de la douleur. La récupération va alors être plus longue avec parfois une raideur partielle séquellaire.

      La liste n’est pas exhaustive et une complication particulièrement exceptionnelle peut survenir, liée à l’état local ou à une variabilité technique.

       

      Quels résultats peut-on espérer après l’intervention du lambeau du grand dorsal ?

      Cette chirurgie a 2 finalités : supprimer les douleurs de l’épaule et restaurer une fonction de l’épaule la plus proche possible de la normale pour votre âge. Cette opération va permettre de redonner de la mobilité mais pas de force. Si cette mobilité est améliorée, elle est rarement complète. Avec le temps, l’effet de l’opération peut diminuer, le vieillissement de votre épaule ne pouvant être stoppé par cette chirurgie.

      Des douleurs climatiques ou positionnelles peuvent perdurer avec le temps, mais la grande majorité des douleurs préopératoires disparaissent progressivement.